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Perspectives... L’accueil des demandeurs d’asile

Horizon n°55  Avril-Mai-Juin 2008

L’asile est la protection qu’accorde un État à une personne étrangère qui a été, ou qui risque d’être persécutée dans son pays. Le statut de réfugié est défini par la convention de Genève du 28 juillet 1951, qui pose les bases juridiques d’une protection internationale des réfugiés en matière de droit d’asile.
En France, plus de 30 000 demandes d’asile ont été effectuées en 2007. Adoma accueille une partie de ces demandeurs et les accompagne tout au long de la procédure. Zoom sur cette activité…
Tout étranger entré régulièrement ou irrégulièrement en France souhaitant bénéficier du droit d’asile doit faire sa demande auprès du préfet compétent. Sauf circonstance exceptionnelle, il n’a pas accès au marché du travail. Mais il dispose d’une allocation de subsistance et de l’accès aux soins le temps que sa demande soit traitée. L’Agence nationale d’accueil des étrangers et des migrations (Anaem) a pour mission de gérer le dispositif national d’accueil.

Cela concerne le dispositif d’hébergement et d’accompagnement, mais pas la procédure de demande d’asile elle-même. Celle-ci est instruite par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) qui délivre, ou non, le statut de réfugié ou la protection subsidiaire (introduite par la réforme de 2003 pour compléter le dispositif de la convention de Genève). Il n’y a pas de durée de procédure déterminée. Après traitement du dossier par l’Ofpra, s’il y a eu demande de recours, il faut attendre la réponse de la Cour nationale du droit d’asile.

Trois résultats sont alors possibles :
  • Le statut de réfugié est accordé : la personne obtient une carte de résident pour une durée de dix ans.
  • Le demandeur obtient le statut de protection subsidiaire : on lui délivre une carte temporaire de séjour d’un an, puis son cas est réexaminé annuellement.
  • La personne est déboutée : elle a un mois pour quitter le pays, mais peut solliciter une aide au retour.
Durant toute la durée de la procédure, le demandeur d’asile peut être accueilli dans un hôtel via le 115, dans un dispositif d’accueil d’urgence des demandeurs d’asile (Auda) ou au sein du dispositif national d’accueil, c’est-à-dire dans un centre d’accueil pour demandeur d’asile (Cada).

Une organisation dédiée à cette activité chez Adoma

Avec plus de 6 000 demandeurs d’asile accueillis en 2007 dans 27 centres Auda et 57 Cada, Adoma concentre plus de 25 % du dispositif national d’accueil, qui compte au total 20 000 places, faisant de l’entreprise le premier opérateur national. Adoma joue donc un rôle majeur dans ce domaine, comme l’État l’a confirmé au travers du Contrat d’objectifs 2005-2010.

Cette expertise reconnue est structurée dans l’entreprise au sein d’une Direction « asile », créée en juillet 2006, qui permet notamment d’aider le personnel asile au niveau juridique et de développer cette activité en homogénéisant les méthodes de travail. Pour ce faire, des Délégués asile régionaux, au nombre de six, sont les interlocuteurs privilégiés du personnel asile : 74 Directeurs de Cada/Responsables Auda encadrent des équipes de professionnels formés spécifiquement pour répondre aux besoins des demandeurs d’asile.

259 intervenants sociaux et 56 animateurs assurent l’accompagnement des demandeurs d’asile dans leurs démarches et veillent à leurs bonnes conditions d’accueil. Au quotidien, il s’agit pour l’équipe de garantir la scolarisation des enfants présents, un accès aux soins et un suivi individualisé du demandeur d’asile, avec la constitution d’un dossier (rédaction du récit) et la mise en relation avec un avocat le cas échéant. Le travail consiste également à proposer aux personnes présentes des animations au sein des différents centres, ainsi qu’à l’extérieur, pour occuper le temps d’attente. Les demandeurs d’asile ont vécu une lourde histoire personnelle que les équipes d’Adoma doivent gérer.

C’est pourquoi l’accueil au sein de ces structures a fait l’objet d’une attention toute particulière. Cet accompagnement de qualité est un facteur de succès dans les dossiers présentés, et a permis en 2007 à 59,2 % des demandeurs d’asile hébergés par Adoma d’obtenir le statut de réfugié, contre un taux global d’admission en France de 19,5 %.

Qui sont les demandeurs d’asile ?

Les principaux pays d’où sont originaires les demandeurs d’asile chez Adoma sont l’Arménie (16,59 % d’entre eux), la Russie (11,39 %) et la Serbie (11,3 %). Les premières causes de cet exil sont bien sûr les guerres qu’ont connues ces régions au cours des deux dernières décennies (voir ci-contre l’entretien avec Olivier Ferrando).

Les familles restent majoritaires et représentent 73,4 % des personnes accueillies, même si le nombre de demandeurs d’asile isolés ne cesse de croître. L’accueil au sein du dispositif national est en moyenne de 401 jours en Cada et de 476 jours en Auda. Dans la mesure où les demandeurs d’asile n’ont pas accès au marché du travail, une AMS (Allocation mensuelle de subsistance) leur est versée par l’État, via les Ddass : en moyenne, 4 € par jour et par personne pour une famille, ou 6 € par jour pour un isolé.

Logement des statutaires : solutions de sortie

Après l’obtention du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire, les personnes ont l’obligation de quitter le centre qui les accueille dans un délai de trois mois, renouvelable une fois. Il est important que le départ se fasse dans les temps pour permettre aux personnes en attente de place de profiter de l’hébergement et de l’accompagnement de ces structures.

Les solutions de sortie sont gérées de différentes manières : par des structures partenaires ou directement par des salariés d’Adoma. Propositions de logement avec baux glissants, financement de dispositifs spécifiques par les Ddass, places en centres provisoires d’hébergement ou places en résidences sociales Adoma visent un accompagnement vers un logement pérenne, condition essentielle à une bonne intégration.

Au sein des centres Adoma, le travail de préparation à la sortie débute dès le début du séjour, sur la base des projets individuels.
5 à 57 C’est l’évolution du nombre de Cada Adoma en sept ans sur l’ensemble du territoire national

Les migrations des pays de l'Est

3 questions à Olivier Ferrando, docteur en sciences politiques de l’Institut d’études politiques de Paris. Est intervenu aux séminaires organisés par la Direction asile d’Adoma.

Horizon : Vous êtes un spécialiste de la géopolitique des pays d’Europe de l’Est. Comment expliquer les fortes migrations en provenance de ces pays ?

Olivier Ferrando : Plusieurs régions à l’est de l’Europe ont connu au cours des deux dernières décennies de violents conflits : les guerres de Yougoslavie – Croatie, Bosnie et Kosovo – mais aussi d’autres affrontements, non moins intenses, qui ont endeuillé la Moldavie (Transnistrie), la Géorgie (Abkhazie et Ossétie du Sud), l’Azerbaïdjan (Haut-Karabakh), le sud de la Russie (Tchétchénie) et l’Asie centrale ex-soviétique (guerre civile du Tadjikistan).

H. : Les chiffres concernant la demande d’asile en 2007, tant au niveau national que chez Adoma, nous renseignent sur les principales nationalités en demande : Arméniens, Russes, Serbes… Comment expliquez-vous cette tendance ?

O.F. : La conséquence directe des guerres est l’exil des populations civiles. Même si la plupart des pays présentés sont aujourd’hui pacifiés, des civils continuent d’affluer en Europe, et en particulier en France. Cela est dû au caractère ethnique des conflits. Lorsque des groupes se sont affrontés sur la base de tels critères, il est difficile de les réconcilier.

Ces déplacés n’ont aucun espoir de retour sur leur terre natale à court ou moyen terme. Derrière les statistiques se cachent donc des réalités ethniques : les demandeurs d’asile de nationalité russe sont en fait souvent des Tchétchènes, ceux de nationalité serbe sont des Kosovars, des Bosniaques ou des Roms, et ceux qui se présentent comme des Arméniens sont souvent nés en Azerbaïdjan. Ces parcours individuels rentrent difficilement dans les cases de l’Ofpra, d’où le rôle primordial des associations d’aide aux demandeurs d’asile, qui rendent ces parcours individuels plus intelligibles aux yeux des autorités administratives.

H. : Quels sont les principaux pays d’immigration de ces personnes. Et pourquoi ?

O.F. : Il faut distinguer deux tendances dans les phénomènes migratoires en provenance de l’ex-URSS et de l’Europe de l’Est. Les demandeurs d’asile tentent de trouver un refuge en Europe occidentale (Allemagne, France et Royaume-Uni essentiellement), souvent dans l’objectif de fuir des conditions de vie rendues difficiles par leur exil et la perte des attaches au territoire de naissance. Mais ces demandeurs d’asile constituent une infime minorité, comparés aux flux de migration économique.

Des millions de migrants du Caucase et d’Asie centrale des anciennes républiques soviétiques partent travailler en Russie, car ce pays connaît un boom économique mais un déclin dramatique de sa population russe. L’Union européenne est jusqu’ici restée à l’écart de ces mouvements de migration économique.
publié le lundi 20 Juin 2011, mis à jour le mardi 9 Juillet 2019

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